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De Calais à Paris, la situation désespérée des mineurs isolés

Publié le : vendredi 28 octobre 2016

Voir en ligne : http://www.huffingtonpost.fr/cather...

Source : www.huffingtonpost.fr

Signataires :
- Catherine Delanoë-Daoud, Avocat au Barreau de Paris
- Emmanuel Daoud, Avocat au Barreau de Paris
- Isabelle Jenoc
- Frédérique Lendres, Avocat au Barreau de Paris
- Isabelle Roth, Avocat au Barreau de Paris
- Florence Roy, "Salam quand-même" sur Fb et Youtube
- Béatrice de Vareilles, Avocat au Barreau de Paris

« Voici ce qui reste ce matin, du campement que nous avons parcouru hier soir sur l’Avenue de Flandre et sous les métros Stalingrad et Jean Jaurès, à Paris.

Voici ce qui reste ce matin, du campement que nous avons parcouru hier soir sur l’Avenue de Flandre et sous les métros Stalingrad et Jean Jaurès, à Paris.

Nous nous inquiétons pour les nombreux mineurs isolés soudanais, érythréens, tchadiens et afghans que nous avons rencontrés. Ont-ils été emmenés par cars, placés en centre de rétention administrative, simplement évacués pour quelques heures, ou ont-ils disparu dans la nature ?

Plusieurs attendaient depuis des semaines de pouvoir enfin être "évalués" par le fameux Démie (Dispositif d’évaluation des mineurs isolés étrangers) géré par la Croix-Rouge française depuis mars 2016. Certains s’étaient déjà fait refouler à cinq reprises devant le sas d’entrée, sans même rencontrer quelque évaluateur ou "médiateur culturel" que ce soit. En attendant, ils restaient dans la rue.

D’autres attendaient la décision d’un juge des enfants devant statuer sur leur mise sous protection par l’Aide Sociale à l’Enfance : entre les audiences et les expertises d’âge osseux et de documents d’identité, ils doivent attendre des semaines et des mois, et cette attente aussi se passe dans la rue.

D’autres encore étaient venus de Calais, redoutant le démantèlement du camp et le risque de voir s’évanouir définitivement leur projet de rejoindre leur famille en Angleterre. Ils avaient raison d’avoir peur, puisque selon les mots de Pierre Henry, directeur général de l’association France Terre d’Asile : "L’opération était exceptionnelle, massive et rapide. Nous n’avions pas le temps de respecter les canons du droit commun de la protection de l’enfance." (Entretien avec La Croix – vendredi 28/10/2016)

Au début de l’année, Europol et l’Unicef déploraient la disparition de 10.000 enfants isolés en Europe depuis 18 mois.
A Calais, contrairement aux promesses faites la veille, les mineurs isolés ont vécu, cette nuit encore, la panique : selon les observateurs présents sur place, au moins une centaine d’enfants isolés étaient sur place hier soir à 22h, encerclés par les policiers, sans même un toit pour la nuit. Ils ont fini par s’éparpiller entre les "restes du campement" de la jungle, le bâtiment non encore détruit de l’école du camp... et la nature environnante.

Au début de l’année, Europol et l’Unicef déploraient la disparition de 10.000 enfants isolés en Europe depuis 18 mois.

Les pouvoirs publics français s’en sont émus : quelle hypocrisie !

Rappelons que la France a ratifié la Convention Internationale des Droits de l’Enfant (CIDE), dont l’article 20 prévoit que "tout enfant qui est temporairement ou définitivement privé de son milieu familial, a droit à une protection et une aide spéciale de l’Etat."

Cette obligation de droit positif est allègrement bafouée dès lors qu’il s’agit d’enfants étrangers.

A Calais on a promis de ne pas laisser un seul enfant à la rue, de ne pas les emmener dans les cars, de les héberger dans des bâtiments en dur pour prendre le temps d’évaluer la situation individuelle de chacun. C’est un mensonge.

De Calais à Paris, nous avons des enfants isolés sous nos yeux, et nous faisons tout pour qu’ils disparaissent...

A Paris, on nous serine "qu’il n’y a pas un seul enfant isolé dans les rues de Paris". C’est faux.

Hier soir à Calais, ce matin à Paris, plusieurs centaines d’enfants isolés (ainsi que des centaines de familles avec des enfants, dont beaucoup en très bas âge), ont vécu des situations traumatisantes d’expulsion.

En définitive, la vérité c’est qu’ici en France, de Calais à Paris, nous avons des enfants isolés sous nos yeux, et nous faisons tout pour qu’ils disparaissent... ou qu’ils partent ailleurs ! Loin des yeux, loin du cœur, une bonne conscience à peu de frais pour les pouvoirs publics, aux risques et périls de ces enfants. »