InfoMIE.net
Informations sur les Mineurs Isolés Etrangers

Accueil > Actualités MIE > Actualités jurisprudentielles > Tribunal administratif de Rennes – Ordonnance n°2304963 du 19 septembre 2023 (...)

Tribunal administratif de Rennes – Ordonnance n°2304963 du 19 septembre 2023 – Référé-liberté – Absence d’accueil provisoire d’urgence (APU) d’un mineur isolé – Ni les contraintes inhérentes à l’organisation de l’évaluation, ni un accroissement du nombre de personnes sollicitant une mise à l’abri en qualité de MNA, ne sauraient justifier que le département se soustraie à l’obligation d’APU

Publié le : mercredi 25 octobre 2023

Résumé :

Le juge des référés, statuant sur le fondement de l’art. L. 521-2 du code de justice administrative (« référé-liberté »), enjoint au département de procéder à la mise à l’abri de l’intéressé, mineur isolé s’étant présenté au service de l’aide sociale à l’enfance sans faire l’objet d’un accueil provisoire d’urgence.

En effet, le juge des référés retient que s’il lui incombe d’apprécier, dans chaque cas, les diligences accomplies par l’administration en tant compte des moyens dont elle dispose ainsi que de l’âge, de l’état de santé et de la situation de famille de l’intéressé, ni les contraintes inhérentes à l’organisation de l’évaluation prévues aux art. L. 221-2-4 et R. 221-11 du CASF, ni celles générées par un accroissement important mais ponctuel du nombre de personnes sollicitant une mise à l’abri en qualité de mineurs non accompagnés, ne sauraient justifier que le département se soustraie à l’obligation d’accueil prévue par le législateur.

Ainsi, dans les circonstances de l’espèce, l’intéressé se trouvant contraint de dormir au sein d’un campement situé dans un parc dans des conditions sanitaires particulièrement difficiles, la condition d’urgence est remplie et l’absence de mise à l’abri porte une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale.


Extraits de l’ordonnance :

« […].

10. Hormis le cas où la personne qui se présente ne satisfait manifestement pas à la condition de minorité, un refus d’accès au dispositif d’hébergement et d’évaluation mentionné précédemment, opposé par l’autorité départementale à une personne se disant mineur isolé, est ainsi susceptible, en fonction de la situation sanitaire et morale de l’intéressé, d’entraîner des conséquences graves caractérisant une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale.

11. S’il incombe en tout hypothèse au juge des référés d’apprécier, dans chaque cas, les diligences accomplies par l’administration en tenant compte des moyens dont elle dispose ainsi que de l’âge, de l’état de santé et de la situation de famille de la personne intéressée, ni les contraintes inhérentes à l’organisation de l’évaluation prévue aux articles L. 221-2-4 et R. 221-11 du code de l’action sociale et des familles, ni celles générées par un accroissement important mais ponctuel du nombre de personnes sollicitant une mise à l’abri en qualité de mineurs non accompagnés, ne sauraient justifier que le département se soustraie à l’obligation d’accueil prévue par le législateur.

Sur la situation de M. B :

12. Il résulte de l’instruction que M. B, ressortissant ivoirien, déclarant être né […] 2007, ne pas voir de famille en France et être sans abri, s’est présenté le 4 septembre 2023 à la mission mineurs non accompagnés (MNA) d’Ille-et-Vilaine afin d’être pris en charge par l’aide sociale à l’enfance. N’étant pas en mesure de le prendre immédiatement en charge, la mission lui a fourni des tickets restaurant et l’a invité à se présenter à nouveau le 11 septembre. Toutefois, à cette date, aucune mise à l’abri ne lui a davantage été proposée dans l’attente d’un rendez-vous en vue de l’évaluation de sa situation. Il est par ailleurs constant qu’il réside, à la date de la présente ordonnance, dans un campement situé parc de la Bellangerais dans des conditions sanitaires particulièrement difficiles. Par suite, dans les circonstances de l’espèce, malgré les difficultés invoquées en défense par le département, tenant notamment à l’augmentation importante du nombre de mineurs isolés au cours des derniers mois, l’absence de mise à l’abri de M. B, dont la minorité en l’état de l’instruction n’est pas remise en cause, est constitutive d’une carence caractérisée dans l’accomplissement de sa mission d’accueil par le département, qui, eu égard à ses conséquences pour l’intéressé, porte une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale.

13. Au regard de la situation de M. B, dont il n’est pas contesté qu’il ne dispose d’aucune solution d’hébergement, la condition d’urgence prévue par l’article L. 521-2 du code de justice administrative doit être regardée comme remplie.

[...]. »


Voir l’ordonnance au format PDF :

TA Rennes – Ordonnance n°2304963 du 19 septembre 2023