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Démantèlement de la « jungle » de Calais : la justice se prononce pour une évacuation partielle

Publié le 25-02-2016

Source : www.lavoixdunord.fr

Auteur : par J-PH.D., T.B et D.M

« Le tribunal administratif de Lille a décidé de suspendre, « de manière partielle », l’arrêté pris par la préfecture du Pas-de-Calais. Ce qui signifie que les occupants de la moitié sud de la « jungle » doivent quitter leurs abris qui, à terme, disparaîtront, « mais cela garantit la préservation des lieux de vie (école, théâtre, lieux de culte, centre juridique mais pas les restaurants et commerces) » dans la partie concernée. La justice avait été saisie en référé vendredi par plusieurs associations d’aide aux migrants, qui entendaient ainsi réclamer le report du démantèlement programmé de la « jungle ». L’ultimatum, fixé initialement à mardi soir, avait été repoussé en attente de la décision de la juge, après l’audience de lundi.

Un démantèlement programmé... et contesté

Le 12 février, la préfète du Pas-de-Calais Fabienne Buccio a annoncé le démantèlement de la moitié sud de la « jungle », programmé cette semaine. Une « nouvelle étape » pour la préfète, après l’évacuation d’une bande de 100 m séparant la « jungle » de la rocade portuaire et de la route de Gravelines, puis l’ouverture du centre d’accueil provisoire (CAP), le 11 janvier , qui doit à terme héberger 1 500 migrants dans 125 conteneurs.

Dans un premier temps, la préfète avait laissé aux migrants de la zone sud jusqu’à lundi, soit un peu plus d’une semaine, pour quitter d’eux-mêmes la « jungle ». Des maraudes sociales ont été mises en place pour informer et diriger les exilés vers le CAP de Calais ou vers des centres d’accueil et d’orientation (CAO) ailleurs en France .

Après une lettre ouverte au ministre de l’Intérieur , à laquelle il a répondu par un refus, plusieurs associations d’aide aux migrants ont déposé un référé au tribunal administratif de Lille , le 19 février, pour demander le report du démantèlement. Parmi ces associations, L’Auberge des migrants, le Secours catholique, Help Refugees ou encore Médecins du monde. Plusieurs migrants se sont également présentés comme requérants. Ce même jour, la préfecture du Pas-de-Calais a émis un arrêté d’expulsion, laissant aux exilés de la zone sud de la « jungle » jusqu’à mardi 20 h.

Les associations dénoncent notamment une gestion « aléatoire » des CAO et CAP et un manque d’information et d’orientation « pour les plus vulnérables », notamment les mineurs isolés. Surtout, elles contestent le nombre de migrants de la zone sud comptabilisé par l’État : ce dernier maintient que « 800 à 1 000 migrants » se trouvent dans cette partie de la lande, tandis que les associations en dénombrent « plus de 3 500 ». Ainsi, les bénévoles estiment que les dispositifs d’accueil prévus par l’État, notamment les CAO, le CAP et le centre d’accueil de jour Jules-Ferry sont en « sous-capacité ». L’État s’en défend en précisant que « même si les migrants à évacuer sont plus nombreux que prévu, nous serons en capacité de tous les prendre en charge ».

L’audience, mardi, au tribunal administratif de Lille , ayant abouti à une mise en délibéré, l’arrêté d’expulsion était caduque jusqu’à la décision du tribunal administratif rendue ce jeudi après-midi.

La décision

Ce jeudi, peu après 16 h, le tribunal a rendu une décision « de suspension partielle de l’arrêté. Cela signifie que les zones de vie, comme les écoles ou les lieux de culte, sont préservées dans la zone concernée par l’arrêté ». Les abris des migrants, en revanche, ne sont pas conservés et devront, à terme, disparaître. L’arrêté préfectoral d’expulsion concernant ces lieux de vie est donc suspendu, « jusqu’à ce qu’il soit statué au fond sur [la] légalité » de son exécution.

Quelles conséquences ?

La préfète du Pas-de-Calais, Fabienne Buccio, a tenu une conférence de presse au centre d’accueil provisoire après l’annonce de la décision du tribunal administratif. Elle a estimé que celle-ci correspondait à ce que les services de l’État souhaitaient mettre en place pour l’évacuation de la moitié sud de la « jungle ». « Il n’a jamais été question d’ultimatum, a commenté la préfète. L’évacuation va se faire de manière progressive ». Fabienne Buccio a par ailleurs confirmé que le maintien des lieux de vie n’était initialement pas prévu dans l’arrêté préfectoral, mais a estimé que la décision de la justice était tout de même« une bonne chose ».

« Pas de bulldozers pour procéder à des dispersions de migrants », a par ailleurs rappelé le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, ce jeudi. Dans un premier temps, des agents de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) devraient aller à la rencontre des migrants pour les convaincre de rejoindre un CAP ou un CAO. Une opération qui se veut « progressive, comme ce fut le cas pour la bande des 100 m », selon la préfecture. « Nous utiliserons tous les moyens possibles en notre disposition pour les convaincre de partir. On prendra le temps nécessaire. »

Ce n’est qu’ensuite, une fois la zone évacuée, que les machines procéderont au démantèlement de la moitié sud de la « jungle », « si on est sûr que les migrants sont dans un centre d’hébergement », a précisé la préfecture. Si la justice administrative avait donné raison aux associations, cela n’aurait « rien changé », selon la préfecture : « Notre objectif, c’est que les migrants partent. Dans tous les cas, nous continuons les maraudes. »

Partant du principe que les dispositifs d’accueil de l’État ne sont pas suffisants, des associatifs ont « déblayé une parcelle au nord pour permettre aux familles vivant dans les caravanes de la zone sud de s’y installer, a expliqué Christian Salomé, de l’Auberge des migrants. C’est juste pour éviter, en cas d’expulsion, que ces familles avec de jeunes enfants se retrouvent sur les routes. On peut y installer une centaine des caravanes ». »

Mineurs isolés : la Défenseure des enfants saisie

Parmi les requêtes des associations figure la question des mineurs isolés. En parallèle, sur demande du Défenseur des droits, son adjointe la Défenseure des enfants s’est rendue à Calais lundi, pour « prendre la mesure des conditions dans lesquelles vivent les enfants » et de constater si l’État remplit ses obligations de mise à l’abri des mineurs de la « jungle ». « Hostile » aux méthodes mises en place, la Défenseure des enfants estime qu’on « ne peut pas envisager de démantèlement dans ces conditions », qui ne sont « pas dignes et décentes ». Elle préconise la « création d’urgence d’un dispositif de mise à l’abri des enfants ». Depuis lundi, quatre conteneurs du CAP ont été réservés, d’après l’État, aux mineurs isolés en cas d’urgence. Ce qui s’ajoute aux maraudes qui incluent le recensement des mineurs isolés.

L’État et le conseil départemental du Pas-de-Calais ont indiqué, lundi, que l’association France terre d’asile a été missionné pour le recensement des migrants. Le 5 janvier, l’association dénombrait 316 mineurs isolés étrangers. Un second recensement, effectué les 9 et 12 février, en comptait 326. L’État avance que les maraudes sociales incluent le recensement des mineurs isolés en situation de détresse « en vue de leur trouver une solution adaptée à leur situation avec les opérateurs du Département ».

Voir en ligne : http://www.lavoixdunord.fr/region/d...