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Migrants, l’hiver meurtrier

Publié le 2-12-2015

Source : http://www.huffingtonpost.fr

Auteur : Pascal Manoukian, Directeur éditorial de l’Agence Capa, auteur du roman Les Echoués, éditions Don Quichotte

« CRISE DES RÉFUGIÉS - La catastrophe humanitaire de cet été, symbolisée par l’image insoutenable du petit corps sans vie d’Aylan échoué sur une plage de Turquie, n’est rien à côté du désastre annoncé par l’arrivée de l’hiver.
Combien d’enfants mourront de froid, les os gelés, cassants comme du verre, enlisés dans un champ boueux des Balkans ou la peau collée au métal glacé des barbelés Hongrois ?
Cent, mille, deux milles peut-être.
Personne ne tiendra les comptes.
L’histoire pourtant nous rendra, elle, tous comptables de ces morts innocentes, parce qu’avec un peu de courage et de détermination politique nous pourrions les éviter.
L’Europe serait-elle brusquement frappée d’amnésie ?
Comment un continent meurtri et saigné à blanc deux fois en à peine un siècle, peut-il avoir oublié ?
Comment un continent où chaque famille a subi les destructions, les privations et l’exode peut-il rester insensible à ces convois de désespérés qui par milliers creusent en les piétinant les routes que nos parents où nos grands-parents ont eux-mêmes empruntées pour fuir l’enfer des combats ?

Calais ne ressemble-t-il pas à ces camps, improvisés dans les campagnes françaises pendant l’exode ?
Ces longues colonnes d’hommes, de femmes et d’enfants harassés sur les routes de Slovénie, ne doivent-ils pas nous en rappeler d’autres ?
Qui ne reconnaît pas dans l’horreur des récits les mots de ses propres parents ?
Pourtant, du courage politique, de la volonté, nous en avons eu quand le malheur nous concernait.
Nous avons su inventer la Croix-Rouge pour porter assistance aux blessés de guerre, la société des Nations et l’Onu pour préserver la paix en Europe, le passeport Nansen pour permettre aux réfugiés et aux apatrides de circuler librement, la convention de Genève pour protéger les victimes des combats.
Nous avons su créer un état pour les survivants de l’holocauste et construire des dizaines de milliers de logements en un temps record pour les rapatriés d’Algérie.
Où est donc passée cette imagination sans limites et pourquoi ne savons-nous plus que dresser des murs ?
Les victimes d’aujourd’hui ne valent-elles pas celles d’hier ?
Pourquoi ne pas obliger par exemple nos alliés du Golfe, avec qui nous sommes si prompts à faire des compromis en matière de droits de l’homme, à financer la construction dans toute l’Europe de structures d’accueil dignes de ce nom ?

Des logements qu’en France nous pourrions faire bâtir par nos chômeurs et nos artisans qui verraient aussitôt les migrants d’un autre œil.
Pourquoi même ne pas imaginer réserver une partie de ses appartements pour loger nos étudiants ? Cela réglerait la galère de beaucoup d’entre eux et assurerait en plus l’intégration et la mixité.
On pourrait aussi obliger ces mêmes états à mettre leurs avions flambant neufs à la disposition des réfugiés de guerre pour éviter à des familles entières des traversées meurtrières.
Ou alors, solution totalement indolore pour les Français, décider de rajouter deux tirages d’Euro millions par semaine et de consacrer les 40% de taxes encaissées par l’état à humaniser les camps existants comme celui de Calais.
La Française des jeux, prendrait alors j’en suis certain, un autre sens pour des millions d’entre nous.
La politique c’est l’imagination. C’est aussi "Savoir à qui on prend du fric pour le donner à qui." comme se plaisait à le rappeler l’Abbé Pierre, l’homme qui a su, un certain hiver de 1954, éviter la catastrophe et mettre à l’abri des milliers d’échoués Français. »

Voir en ligne : http://www.huffingtonpost.fr/pascal...