InfoMIE.net
Informations sur les Mineurs Isolés Etrangers

Accueil > Actualités MIE > L’Hérault aux prises avec l’accueil des mineurs isolés

L’Hérault aux prises avec l’accueil des mineurs isolés

Publié le 18-04-2017

Source : www.midilibre.fr

Auteur : Hélène Amiraux

« Les dispositifs d’hébergement sont régulièrement saturés, obligeant les services à s’adapter en permanence.

L’accueil des mineurs étrangers isolés baptisés désormais mineurs non accompagnés (MNA) représente une activité chaque jour plus intense au sein de la collectivité départementale de l’Hérault. Ces jeunes arrivent chaque jour partout dans l’Hexagone, en particulier depuis l’Afrique (75 %), notamment du Maroc et de Guinée. Un flux de migration économique en hausse constante depuis 2016.

1. Qui sont-ils  ?

"Ils ont connu des galères, subi des humiliations et des violences avant d’arriver sur le sol français", décrit la Direction départementale enfance famille. "La plupart du temps, ils sont repérés par la police à la gare Saint-Roch, explique Yolande Côté, chargé de mission MNA. Ou ils se rendent directement au commissariat. On alerte le foyer départemental de l’enfance et de la famille, des éducateurs vont les chercher et on les met à l’abri, c’est la loi."

Par définition sans représentants légaux sur le territoire, c’est toujours en application d’une décision de justice que ces moins de 18 ans sont confiés au Département. Soit par un juge des enfants, soit par le parquet en vertu de ce qu’on appelle une ordonnance de placement provisoire.

2. L’assistance éducative

Ils font ensuite l’objet de mesure d’assistance éducative et sont hébergés dans les différentes structures de la collectivité héraultaise (4). Jusqu’à leur majorité dans le but de les conduire vers l’autonomie. "En un an et demi à peine, ils doivent relever le challenge : apprendre le français et obtenir une formation, 90 % d’entre eux y parviennent."

3. Accueils surchargés

Au 1er avril 2017, la collectivité prend en charge 273 MNA (dont 70 arrivés depuis le début de l’année), au titre de sa mission d’aide sociale à l’enfance (2391 enfants au total, pour 2300 places en tout). En 2014, la collectivité n’en comptait que 85. En 2016, 134. Une quote-part réévaluée chaque semaine en fonction d’une clé de répartition démographique fixée par le ministère de l’Intérieur à 1,73 % du nombre total de ces jeunes, arrivant sur le territoire. Autour de 8000 actuellement (ce chiffre pourrait atteindre les 10000 d’ici la fin de l’année). Un pourcentage qui a été adossé à l’évolution de la population. "L’Hérault gagne 1 000 habitants par mois, d’où une clé de calcul préjudiciable pour nous", note Agnès Devocelle, directrice enfance famille.
Et des hébergements héraultais saturés, alors que d’autres départements ferment des lieux d’accueil. "Nous avons fait valoir notre position auprès du ministère de la Justice", indique Agnès Devocelle. Désormais, en cas de manque de lits, le parquet peut faire une demande de réorientation du mineur vers d’autres départements (opérée dans les quinze jours, trois semaines).

4. L’hôtel en urgence

Quand un jeune débarque, l’association Raih (Réseau accueil insertion Hérault) est d’abord chargée d’évaluer sa minorité et son isolement, sur cinq jours. Depuis quelques mois, Raih est appuyé par l’Avitarelle pour faire face au flux. Dans l’immédiat, ces MNA sont hébergés en urgence par le foyer départemental de l’enfance et de la famille. Faute de place, les plus âgés se retrouvent en hôtel, un système qui n’existe ni à Marseille ni à Toulouse. Une option très critiquée par certains services chargés des MNA pour son manque d’encadrement de jeunes particulièrement fragiles et exposés à la délinquance, au trafic de drogue ou encore à la prostitution (lire ci-dessous).

"Pour autant, ces jeunes ne sont pas livrés à eux-mêmes. Ils sont suivis par une équipe d’éducateurs du foyer de l’enfance de Montpellier, martèle Yolande Côté, avec une surveillance dans les hôtels, la mise en place d’une scolarisation, d’un suivi de leur santé, une distribution de bons pour les repas."

5. Créations de places d’hébergement

L’Hérault dispose actuellement de 2 300 places relevant de l’aide sociale à l’enfance (ASE) pour accueillir un total de 2391enfants, mineurs étrangers compris. Placés auprès d’assistants familiaux pour les plus petits. En accueil collectif de type maison d’enfants, lieux de vie, foyers de jeunes travailleurs pour les autres, dans l’Hérault mais aussi le Gard et l’Aveyron.

Et depuis 2015, un dispositif expérimental de type colocation en appartements, est dédié aux MNA  : "Pour vider les hôtels, explique Agnès Devocelle, on a ouvert 62 places au sein de l’association Un toit où apprendre." Ils y reçoivent des cours de français. Globalement, le Département se doterait d’une cinquantaine de lits en plus par an.

6. Contrôles

La Direction enfance et famille assure qu’en 2016, une vingtaine de MNA ont été mis en cause dans des infractions pénales. Soit 7 % "seulement" de l’effectif. En fonction de la gravité ou de la fréquence de leurs méfaits, ils font l’objet de mesures pénales et peuvent être confiés à la Protection judiciaire de la jeunesse. Mais là aussi, il y a saturation. Depuis un décret de l’automne 2016, la collectivité peut saisir la Police de l’air et des frontières, sans passer par le parquet, pour contrôler ces mineurs au récit migratoire souvent formaté par les réseaux de passeurs, avec parfois de faux papiers et utilisant de multiples identités.

La Paf contrôle cinq jeunes par semaine (prise d’empreintes passées aux fichiers Eurodac, Visabio, vérification des antécédents judiciaires et du parcours). "Je les rencontre tous les jeudis midi pour leur demander leur consentement à une enquête. On les avise à chaque étape des risques qu’ils prennent et la police aussi. S’ils prétendent être mineurs alors qu’ils ne le sont pas, on leur dit qu’ils encourent la prison, ils savent que les risques d’incarcération sont importants", affirme Yolande Côté.

D’après le Département, douze jeunes ont prétendu être mineurs en 2016. Et six en 2017. À l’issue de l’évaluation, si le parquet émet un avis négatif sur la minorité, le magistrat peut demander une expertise osseuse et dentaire. Cependant, la marge de précision est de deux ans. Entre 17 et 19 ans, la présomption de minorité doit s’appliquer. »

Voir en ligne : http://www.midilibre.fr/2017/04/17/...