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Une éducatrice mise à pied pour avoir critiqué les conditions d’accueil des mineurs étrangers

Publié le 30-01-2017

Source : www.leparisien.fr

Auteur : L.L.R

« Cette éducatrice spécialisée qui avait dénoncé des dysfonctionnements dans un foyer d’hébergement de Châlons-en-Champagne (Marne) géré par son employeur, risque d’être licenciée. Un jeune Malien s’y était défenestré quelques jours plus tôt.

Elle ne regrette rien de ses propos et ne « comprend pas » les foudres qu’ils lui ont valu. Ibtissam Bouchaara, déléguée syndicale et éducatrice spécialisée auprès de l’association d’aide à l’enfance « la Sauvegarde de la Marne » à Reims, s’est vu signifier sa mise à pied ce lundi, et risque un licenciement pour faute grave. Son tort ? Avoir dénoncé dans les médias les conditions d’accueil des mineurs isolés étrangers dans un foyer d’hébergement géré en partie par son employeur dans la ville voisine de Châlons-en-Champagne (Marne), et dans lequel un jeune Malien s’est donné la mort le 9 janvier dernier.

Contactée ce lundi par Le Parisien, l’éducatrice est encore sous le choc et peine à trouver ses mots. Elle qui travaille pour « La Sauvegarde » depuis plus de quinze ans n’en revient pas d’être mise en cause par sa direction. Élue déléguée syndicale le 19 décembre dernier, Ibtissam s’est rendue dans le foyer d’hébergement « Bellevue » de Châlons-en-Champagne quatre jours plus tard, pour y observer les conditions de travail de ses collègues.

La nuit, un simple concierge pour 150 résidents

« Quand j’ai visité la structure, plusieurs choses m’ont choquée. Des effectifs, pas très réglementaires, avec seulement quatre éducateurs pour 73 gamins », détaille-t-elle. Sur les 73 mineurs étrangers, environ la moitié ont un statut avéré de « mineur isolé », tandis que les autres sont encore en attente d’évaluation. Autre surprise : avec ces mineurs cohabitent selon elle avec des dizaines d’adultes en situation de précarité, ce qui porte le nombre total de résidents à 150. Enfin, à 18 heures, les équipes de « La Sauvegarde » quittent les lieux, effectuant une prise en charge de jour uniquement. Ne reste alors qu’un simple concierge pour surveiller tout le bâtiment.

Dans une tribune publiée sur Internet, Ibtissam Bouchaara explique aussi qu’elle ne s’attend pas « à ce que l’Aide sociale à l’enfance alloue si peu de moyens à leur prise en charge, qu’on qualifie l’absence de veilleur de nuit comme de la semi-autonomie et qu’une association pour qui nous avons tant milité me soit devenue à ce point méconnaissable. »

Et d’ajouter que « le coup final a été porté par l’annonce du suicide d’un des pensionnaires (du foyer de Bellevue ndlr) quinze jours après mon passage ». Il s’agit de Denko Sissoko, un jeune Malien de seize ans qui s’est tué en sautant par la fenêtre de sa chambre. Le 11 janvier, une marche blanche a été organisée en mémoire de ce jeune homme, dont le statut de mineur était encore en cours d’évaluation.

Le Conseil général n’a pas souhaité réagir

Ibtissam Bouchaara, qui participe à la manifestation, répond aux questions des médias qui couvrent l’événement, notamment Radio Primitive et le Bondy Blog. Elle dénonce alors le manque de personnel au sein de la structure et « aucune prise en charge de la souffrance psychologique des mineurs » suite au drame. Si la jeune femme assume pleinement ses critiques, elle se défend en revanche d’avoir attribué à son employeur ou au Conseil général la responsabilité de la mort de Denko Sissoko.

Le Conseil général n’a pas souhaité réagir, indique l’AFP, précisant qu’il laissait à l’association la responsabilité de sa décision. Contactée par Le Parisien, celle-ci n’était pas joignable ce lundi.

Des critiques oui, mais pas de diffamation selon l’éducatrice

« On me reproche un dénigrement de l’entreprise et de la diffamation, mais personne ne me dit en quoi mes propos sont diffamatoires », s’étonne-t-elle. Dans un courrier distribué le 17 janvier au personnel, la direction avait réprouvé « des attaques infamantes et répétées » de la part de « certains des siens ». « Ces déclarations déraisonnables et fallacieuses portent atteinte à la légitimité et à la crédibilité de toutes nos activités », avait-elle ajouté, demandant « réparation du préjudice ».

Une cinquantaine de personnes se sont rassemblées pour soutenir l’éducatrice ce lundi, devant le siège de l’association « La sauvegarde » à Bezannes, selon la préfecture. En outre, une pétition en ligne sur Change.org comptabilisait plus de mille signatures en sa faveur ce lundi. »

Voir en ligne : http://www.leparisien.fr/societe/un...