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Aide aux migrants : "À partir du moment où on a une défaillance des institutions, le citoyen doit prendre le relais"

Publié le 6-01-2017

Source : www.francetvinfo.fr

«  Auteur d’un livre sur le quotidien dans un service d’accueil pour mineurs isolés, Rozenn Le Berre a réagi, vendredi sur franceinfo, à la décision du tribunal de Nice de relaxer Pierre-Alain Mannoni, l’enseignant qui avait aidé des migrantes érythréennes.

"J’espère qu’on va arrêter avec ces procès contre les militants et les aidants" a réagi vendredi 6 janvier sur franceinfo Rozenn Le Berre, auteur d’un livre qui raconte son quotidien dans un service d’accueil pour mineurs isolés étrangers. Elle se réjouit de la relaxe de Pierre-Alain Mannoni vendredi à Nice. L’enseignant-chercheur était jugé au tribunal correctionnel pour avoir aidé des migrants. Cette décision a été rendue au lendemain du procès médiatique de Cédric Herrou, un agriculteur de l’arrière-pays niçois dans lequel le procureur a requis huit mois de prison avec sursis.

franceinfo : Quel est votre sentiment sur les gens qui ont aidé les migrants quitte à se mettre hors-la-loi ?

Rozenn Le Berre  : C’est absolument nécessaire ! À partir du moment où on a une défaillance des institutions, le citoyen doit prendre le relais. Tous les mineurs doivent être hébergés par les conseils départementaux car il se trouve qu’on a des mineurs à la rue. C’est donc aux citoyens et aux militants de prendre le relais. Si l’institution est défaillante, pourquoi embêter les gens qui prennent le relais ? Je suis ravie de la relaxe de Pierre-Alain Mannoni et j’espère qu’on va arrêter avec ces procès contre les militants et les aidants.

Concernant les jeunes migrants, que dit la loi ?

Il y a deux choses. La loi exige que lorsqu’un mineur étranger se présente en France, dans mon service en l’occurrence, il doit être hébergé immédiatement. Or, cette loi n’était parfois pas appliquée puisque je devais annoncer à ces jeunes qu’il n’y avait pas de place et qu’ils devaient dormir dehors. La seconde chose, c’est pour les jeunes qui étaient reconnus majeurs. Le conseil départemental refusait de les prendre en charge parce qu’il ne croyait pas à leur "minorité". À ce moment-là, la loi exigeait qu’ils soient dehors, c’était donc à moi et aux travailleurs sociaux de leur annoncer ça.

Est-ce facile à vivre ?

Pas du tout ! Surtout quand on sait que la décision est illégale, c’est-à-dire pour les mineurs étrangers qui viennent d’arriver et qui doivent être hébergés. C’est à nous de leur annoncer qu’ils doivent dormir dehors. C’est terrible.

Comment ne pas être touché par la violence, les déceptions et les mensonges qu’ils ont tous subi ?

D’un côté, ce sont des jeunes qui arrivent dans une situation de vulnérabilité et de précarité immense. De l’autre, ce sont des jeunes qui ont une force de vivre hallucinante et que j’ai rarement vue ailleurs. Voir cet acharnement permet de tenir. C’est très beau d’assister à ce qu’ils développent pour pouvoir vivre et survivre en France. Ça donne envie de les accompagner et des aider au maximum.

A-t-on le droit d’accueillir des gens chez soi ?

C’est la question du délit de solidarité qui, officiellement, n’existe pas. On l’a vu avec ces deux derniers procès (de Cédric Herrou et de Pierre-Alain Mannoni) dans lesquels le procureur a requis de la prison avec sursis. Le délit de solidarité existe puisqu’il est porté devant les tribunaux. Mais le message de la relaxe de vendredi à Nice est très fort puisqu’il veut dire qu’on n’a pas le droit d’être condamné pour avoir aidé un migrant. »

Voir en ligne : http://www.francetvinfo.fr/monde/eu...