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Enfants migrants disparus. « Des proies faciles pour les trafiquants »

Publié le 4-02-2016

Source : http://www.ouest-france.fr

Auteur : Cécile Réto

« L’agence policière Europol chiffre à 10 000 le nombre de disparitions de mineurs. Pour Pascal Brice, de l’Ofpra, beaucoup de mineurs sont la proie des trafiquants.

Entretien

Pascal Brice, directeur de l’Ofpra, office français de protection des réfugiés et apatrides.

Europol parle de 10 000 enfants migrants qui se seraient « volatilisés » depuis deux ans. Cela vous semble crédible ?

Oui. Ce qui est certain, c’est que le nombre de mineurs en situation dramatique est à la mesure de la crise de ces derniers mois. Il est difficile de les quantifier mais ils sont extrêmement nombreux et le chiffre donné par Europol a le mérite d’alerter sur la situation de ces jeunes. Ils sont nombreux. Nous le savons, nous les voyons. Nous tentons de faire le maximum pour les protéger mais leur trace est souvent perdue après leur enregistrement en Italie ou en Grèce.

Qui sont ces enfants ?

Ce sont rarement des tout-petits : eux voyagent avec leurs parents, sauf accident en chemin. Les mineurs isolés sont plutôt des jeunes de 15-18 ans, originaires d’Érythrée, du Soudan, d’Afghanistan, plus rarement d’Irak ou de Syrie. Ce sont majoritairement des hommes, mais parmi eux se trouvent aussi des filles : isolées, elles sont d’autant plus facilement repérables.

Une proie facile pour les passeurs ?

On le constate, oui. Les femmes, comme les jeunes garçons mineurs, sont la cible privilégiée des trafiquants, notamment des réseaux d’exploitation sexuelle. La situation est très préoccupante. Nous venons encore de repérer des jeunes Nigérianes, prostituées de force en Italie et en France.

Est-ce que ce sont leurs propres familles qui les incitent à migrer ?

Parfois, oui, certains ont été poussés à migrer par leurs parents, qui pensent les « sauver ». Mais il y a toutes sortes de situations : ce sont aussi souvent des jeunes qui ont perdu tout contact avec leurs proches très tôt.

Comment peut-on perdre la trace de ces mineurs ?

C’est dramatique. Cela illustre l’inefficacité des contrôles aux frontières extérieures de l’Europe. Dans des conditions d’extrême fragilité, ces mineurs suivent les routes de l’exode chaotique des adultes. Ils sont beaucoup plus mobiles que leurs aînés. Et tous veulent rallier l’Allemagne. Parce qu’ils pensent y trouver du travail, y rejoindre des proches, d’anciens voisins… Ou simplement parce que tout le monde y va !

Que se passe-t-il pour ceux qui arrivent en France ?

Notre pays a mis en place des dispositifs particuliers pour les mineurs. À leur arrivée, ils sont pris en charge par les conseils généraux. Lorsqu’ils demandent l’asile, une procédure spécifique est mise en place à l’Ofpra. Un administrateur ad hoc est désigné, une sorte de tuteur qui accompagne le jeune pendant toute la procédure. En 2015, 4 000 mineurs isolés ont été accueillis par les conseils généraux en France.

Comment expliquer la présence de jeunes seuls dans des camps comme ceux de Calais ou Grande-Synthe ?

Nous intervenons dans ces camps avec des associations comme France Terre d’asile mais là, l’enjeu est différent. Il s’agit de les convaincre de sortir pour être pris en charge dans des centres d’accueil. Car leur projet, c’est la Grande-Bretagne. Ils ont en tête tous les mythes que propagent les passeurs. Je m’y rends toutes les semaines, avec des collègues, pour convaincre ces migrants, notamment les mineurs, de renoncer à cette idée pour accepter notre aide.

Avec 140 réfugiés, adultes et enfants, récupérés dans les centres d’enregistrement pour être accueillis en France, on est loin des 30 000 promis sur deux ans par le plan européen…

Ce dispositif se met en place trop lentement, c’est vrai, mais essentiellement parce que les migrants souhaitent aller en Allemagne au lieu d’entrer dans ce dispositif de relocalisation (dans l’un des 28 États membres). Sans doute parce qu’ils ne sont pas assez bien informés. »

Voir en ligne : http://www.ouest-france.fr/monde/mi...